Le système d’endettement immobilier en Suisse

Je m’intéresse de plus en plus à l’immobilier en Suisse, et il y a un truc qui m’a un peu retourné le cerveau au début : ici, l’endettement est presque une norme. Pas juste toléré, mais carrément pensé comme un pilier du système.

Contrairement à d’autres pays où on valorise le remboursement rapide des dettes, en Suisse, c’est presque l’inverse. Alors j’ai voulu comprendre comment ça marche, et surtout pourquoi c’est fait comme ça.

Voici 5 choses que j’ai retenues.

1. Les taux d’intérêt sont ultra bas

En Suisse, les taux d’intérêt hypothécaires sont parmi les plus faibles au monde. C’est lié à la stabilité économique du pays et à la force du franc.

Du coup, emprunter entre 1 % et 2 % pour de l’immobilier, c’est carrément possible. Et quand on voit que certains investissements peuvent rapporter 6, 7 ou 8 %, on comprend vite que l’argent emprunté devient un levier puissant. On paie peu, mais on peut potentiellement gagner beaucoup.

2. La fiscalité pousse à l’endettement

En Suisse, être propriétaire à titre privé, c’est être imposé de plusieurs manières : impôt foncier (très faible), impôt sur la fortune, et impôt sur le revenu. Les deux derniers sont les plus impactants.

On doit déclarer la valeur fiscale du bien, qui est souvent bien plus basse que sa valeur réelle sur le marché. Par exemple, une maison qui vaut 1 million peut êvoir une valeur fiscale de 600’000 ou moins. Et sur cette base, on déclare sa fortune… sauf qu’on peut déduire la dette liée à ce bien.

Donc, si la dette est plus élevée que la valeur fiscale (ce qui est souvent le cas), on se retrouve avec une fortune négative sur papier, ce qui fait chuter son impôt sur la fortune.

Côté revenu, on est imposé sur une valeur locative (si on habite le bien) ou sur les loyers encaissés (si on le loue). Mais on peut aussi déduire les intérêts hypothécaires, ce qui baisse les revenus imposables. Bref, plus on est endetté, plus on déduit.

3. L’amortissement est limité et intelligent

Le système suisse est basé sur une division entre le 1er rang hypothécaire (jusqu’à 65 % de la valeur du bien) et le 2e rang (les 15 % suivants, en gros).

Ce qu’on doit rembourser, c’est uniquement le 2e rang, sur 15 ans. Donc, au total, on rembourse 1 % du montant par année, et après 15 ans, on a 35 % de fonds propres dans le bien (les 20 % de départ + les 15 % remboursés).

Mais ce qui est fou, c’est que si la valeur du bien augmente entre-temps, on peut atteindre ces 35 % de fonds propres plus vite, sans avoir à rembourser davantage. La banque peut actualiser la valeur du bien, et si on est à moins de 65 % de dette par rapport à la nouvelle valeur, on n’a plus d’obligation de rembourser davantage. Ultra flexible.

4. On peut générer du cash sans vendre

Ce point m’a vraiment surpris. Si on est propriétaire (ou si des proches le sont), il est possible de retirer du cash en augmentant l’hypothèque, sans vendre.

Par exemple, des parents retraités peuvent avoir un bien de rendement avec peu de dette. Plutôt que de vendre pour aider leurs enfants, ils peuvent augmenter l’hypothèque et faire un avancement d’hoirie. Le bien reste autoporteur (les loyers couvrent les intérêts), les parents gardent leur bien, et les enfants reçoivent des fonds pour acheter ou investir à leur tour.

C’est un montage intelligent, parfaitement légal, sans impôts (dans certains cantons comme le Valais) et qui permet de transmettre sans se déposséder. Le patrimoine reste dans la famille.

5. La dette est un passage obligé pour construire un patrimoine

C’est peut-être ce que je retiens le plus : personne ne construit un patrimoine immobilier sans s’endetter. C’est le système qui veut ça.

Oui, il y a une part de risque. Mais si on comprend les règles du jeu, qu’on reste dans des proportions raisonnables et qu’on anticipe bien ses flux de tréso, le système est plutôt favorable. En fait, ça devient une compétence à part entière : savoir utiliser intelligemment l’endettement pour investir, sans se mettre en danger.


En gros, plus j’avance dans mes lectures et mes recherches, plus je vois que le système suisse n’est pas juste « tolérant » avec la dette immobilière : il l’encourage activement. Et tant qu’on joue avec les bonnes cartes, ça peut clairement devenir un levier puissant pour développer un patrimoine.